Etudier à l’étranger? Les anciens vous en parlent:
Que ce soit pour bénéficier d’une meilleure formation et en faire profiter son pays plus tard ou pour tout simplement continuer de vivre hors des frontières, la question se pose à tout élève tunisien se sentant capable d’exceller un jour dans un domaine bien déterminé. Khayem, Wassim, Yasmine et Skander ont tous étudié à l’étranger, leurs avis, leurs expériences et leur vision des choses nous sera énormément utile pendant la recherche d’une réponse à cette question.
Lorsqu’on demande à Khayem Chemli, inscrit à la Peking University HSBC Business School pour son master de recherche en Management, après avoir eu sa licence en Finance de l’IHEC de Carthage : Qu’est-ce que l’université dans laquelle vous poursuivez vos études a de plus que l’université tunisienne ? Sa réponse est :
«Ce qu’a cette école de plus que l’université Tunisienne c’est l’aspect international de l’environnement d’études. Le corps enseignant ainsi que les étudiants viennent de partout dans le monde. L’administration centrale n’est pas laxiste, elle est efficace et répond rapidement aux besoins. Les méthodes d’enseignement sont à jour, il n’y a quasiment pas de cours magistral et tous les cours sont dynamiques. Aussi, au sein de l’école, nous avons l’opportunité de travailler en tant que Research Assistant ou Teacher Assistant et d’être payé par l’école. Le Job consiste à assister un professeur dans une recherche qu’il décide de faire, ou de l’aider à faire son cours, l’organiser…etc.
Il y a aussi plein d’opportunités de travailler en part-time en dehors du campus. Enfin, l’insertion professionnelle est garantie : l’école accompagne l’étudiant dans son cursus professionnel.»
Skander Bouhanek, ancien boursier du gouvernement tunisien à Audencia (France) pense que
«D’abord, le diplôme de mon université est classé 9ème meilleur diplôme d’école de commerce en France et 23ème mondial par the Financial Times. Ce qui procure du prestige et de la valeur au diplôme que j’ai pu obtenir. Cela permet de rendre mon CV très concurrentiel et donc me donne la chance d’accéder à des postes de responsabilité assez élevée dans les entreprises les plus prestigieuses.
(…) L’autre avantage est aussi de pouvoir se plonger totalement dans une culture. En effet, une université n’est pas simplement ce qu’elle propose comme cours ou comme formation. Car cela ne constitue en fait que 50% du temps passé en université. Le reste du temps est consacré aux activités associatives qui organisent des évènements ou des activités dans la ville de Nantes. (…) Les activités des associations des Universités étrangères sont beaucoup plus reconnues et soutenues par les collectivités locales que les activités des associations des universités tunisiennes.»
Il est donc à noter que les universités internationales offrent énormément d’opportunités à leurs étudiants... mais que dire de leurs inconvénients? « L'université me satisfait pleinement. A part le fait que je n’aie pas des vacances comme j’en aurais eu à Tunis.» Nous confie Yasmine Kechaou, 21 ans, étudiante à Karlsruher Institut für Technologie (KIT) à Karlsruhe en Allemagne.
Skander nous raconte aussi sa mésaventure avec l’administration d’Audencia :
« Tout est bien, sauf, l’administration, qui elle s’est montrée d’une rigidité handicapante. Ainsi, j’ai été déçu de ne pas avoir pu m’inscrire dans le cursus Ingénieur – Manager que je voulais intégrer qui proposait un échange avec l’Ecole Centrale de Nantes et qui donc donnait la possibilité d’avoir un double diplôme. La déception est due principalement à l’explication fournie par l’administration qui avait validé mon dossier et ma lettre de motivation mais qui s’est trouvé devant un obstacle majeur : les cours d’Arabe sont à la même heure que certains cours de l’Ecole Centrale. J’ai été également déçu par l’administration qui a refusé que je poursuive ma formation en Allemand et qui à la place, m’a inscrit de force dans des cours d’Italien aussi ennuyeux qu’inutiles. »
Ces inconvénients ont donc imposés à nos jeunes étudiants des challenges professionnels plus ou moins ambigus, qu’en est-il des challenges personnels ?
« Les plus gros challenges restent pour moi des challenges culturels étant donné que j’étudie en Chine. Bien que j’aie déjà fréquenté et hébergé des chinois chez moi à Tunis, l’adaptation à leur culture et traditions culinaires était une tâche délicate. La vie au campus est aussi un challenge en soi : mener la vie seul, laver ses vêtements, faire la vaisselle, s’occuper des factures, cuisiner, se réveiller à l’heure…etc. Tout ceci est nécessaire pour forger une personnalité plus agréable et plus facile à vivre dans le futur. »
Nous affirme Khayem, quant à Yasmine elle nous raconte que
« Mon premier challenge en venant ici était évidemment de parler l’allemand, Bien. Je ne l’ai pas choisi comme option au lycée, mais ce n’était pas un problème, j’ai progressivement avancé, surtout après m’être décidée au bout de la deuxième semaine, de ne pas parler en anglais ou en français avec mes nouveaux amis, mais d’essayer de leur faire parvenir mon idée en allemand, peu importe comment.»
Aussi, Wassim, qui étudie les mathématiques à l’Université Technique de Munich, nous fait part d’un point délicat : « mon challenge était de m’imposer en tant qu'étranger: “Vous avez eu accès à nos universités, montrez-nous de quoi vous êtes capable "là-bas" ! ” »
Wassim est aussi un membre du bureau de la TAG (Le réseau des académiciens tunisiens en Allemagne). L’organisation vise loin, localement et en Tunisie : créer un bon réseau d’entrepreneurs tunisiens en Allemagne, ayant pour objectif commun: venir en aide (structurée et de longue durée) à la Tunisie.
D’autre part, Skander nous communique les challenges techniques et culturels qu’il a rencontrés: « Les vrais challenges ont surtout été en prépa, où je me suis retrouvé en internat (chambre individuelle de 5m² soit à peine de l’espace pour rentrer un lit superposé à un bureau). La gestion du budget était aussi un challenge puisque je devais me contenter de la bourse de l’état (qui était alors de 500 euros/mois – maintenant elle est à 800 euros). Les cours étaient un challenge puisque j’étais avec les têtes d’ampoule de la France. Beaucoup de 19 au bac français, des gens avec des hobbies étranges (Jouons à «Devine où se trouve la ville de Achgabat et place là sur la carte » - C’est en Turkménistan). Je me suis très vite retrouvé dépassé par tant de culture et de connaissances. Il fallait donc que je rattrape mon retard en Histoire Géo philo, puis essayer de faire de la compétition à ces génies. Ce n’était pas facile. Il fallait aussi apprendre à cuisiner un minimum (on ne peut pas manger au macdo chaque jour), apprendre à faire ses courses, à gérer son linge sale, etc… C’est là le vrai challenge. Apres tout ça, la vie devient tellement simple.
Alors qu’est-ce que ces jeunes, désormais, expérimentés pourront nous offrir comme conseils ? « Je conseille de bien être ouvert d’esprit, d’essayer d’élargir vos horizons dans tous les sens possibles, de créer vos propres opportunités et bien en profiter, mais surtout d’être actif dans l’extra universitaire, parce qu’en fin de compte, tout le monde prend les mêmes cours (ou presque) et les notes dans le bulletin, restent des notes sur un bulletin. Le vrai développement personnel c’est dehors qu’on l’acquiert, en vivant sa propre expérience.» Nous explique Yasmine.
Quant à Khayem, il nous déclare : « (…) le chemin de la Chine est économiquement l’avenir des prochaines décennies. Je conseillerai aux jeunes lycéens de penser out of the box et d’arrêter de suivre le troupeau. L’université Tunisienne n’est pas catastrophique non plus, j’y ai vécu 3 ans et j’estime que j’ai été très bien formé. Dernier conseil, ne fuyez pas votre pays. Etudier à l’étranger n’est pas fuir. Formez-vous, apprenez, travaillez et construisez une vie même, mais pensez un jour à rendre ne serait-ce qu’un milligramme à la Tunisie qui vous a donné la nationalité.»
Skander confirme : «J’avais la possibilité de faire comme beaucoup de mes camarades et choisir de rester en France, où même aller ailleurs, car personne ne nous imposait de limites dans les choix de nos stages, et les stages aboutissent très souvent à un premier emploi. Cependant cela ne m’intéressait pas. Je ne comptais pas vivre à l’étranger. J’ai toujours pensé retourner vivre en Tunisie. Et j’ai toujours été convaincu par ce choix. Car il faut voir les choses de cet angle-là : le premier qui m’a offert une opportunité c’était la Tunisie, et je lui suis reconnaissant pour cela. Sans la bourse qu’elle m’a accordé, le budget qu’elle m’a consacré, les formalités qu’elle a fait pour moi, je n’aurais jamais pu devenir qui je suis maintenant. Je suis donc reconnaissant à cette Tunisie qui a cru en moi un jour, et c’est donc en retournant travailler en Tunisie que je la remercie pour cela.»
«Foncez. Ne regrettez JAMAIS vos choix, assumez et pensez qu'il y a plein d'opportunités qui ne se mettent pas du jour au lendemain, car il faut creuser! Et croyez en vous, les allemands ne nous dépassent que par la discipline. Nous par contre, par la joie de vivre!» Nous déclare Wassim.
Et enfin, Khayem nous fait part de ses inquiétudes envers les élèves de son ancien lycée : le lycée Pilote Ariana :
« ...Ne vous laissez pas stigmatiser votre avenir. Il n y a pas que médecine ou ingénierie pour réussir. Si vous aimez l’architecture, n’hésitez pas. Si vous aimez les affaires, faites un business school. Beaucoup d’élèves ont choisi d’emprunter d’autres chemins et aujourd’hui ils réussissent leur vie à merveille. Je trouve que le LPA, les professeurs et les parents sont responsables de ce petit lavage de cerveau inutile. Donc dites votre mot, et bonne chance pour cette excellente initiative, je vous encourage ! »
Pour couronner le tout, les études à l’étranger quels que soient leurs cadres et leurs buts, représentent une excellente opportunité aux étudiants ambitieux, une avance palpable, au niveau professionnel, mais il ne faut pas oublier les challenges qu’elles imposent : des challenges culturels, techniques et même personnels. Tous nos interviewés ont insisté sur l’importance de croire en ses chances, de sortir des chemins battus et de construire son propre avenir.
#ThinkOutsideTheBoxKater el Nada Helali (Bac 2017)
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